Les Maramures
du 1er au 5 octobre
La Roumanie, je l'attendais au tournant. Marie aussi, mais elle la craignait plus. Sur le menu, elle était très alléchante. Alors voilà, nous y sommes. Et bien je dois dire que la surprise est de taille. Pas sur l'idée que je me faisait des Maramures, car c'est assez proche de ce que j'attendais. Mais sur tous les points, ambiance, accueil, paysages, architecture, authenticité, mon estimation était fausse, bien trop basse. Tout est vrai, mais en mieux.
Nous sommes arrivés dans un petit village, assez étendu et clairsemé en terme d'habitations, et tout de suite, nous nous trouvions confrontés à la première surprise. Nous savions que certaines routes risquaient d'être mauvaises. Mais là, tout le village était sillonné de chemins de terre et cailloux, comme nos chemins de randonnée. Nous avons posé notre voiture près de notre maison traditionnelle, et depuis, nous avons tout fait à pied en empruntant ces chemins. C'est un petit paradis d'authenticité. Les paysages sont à couper le souffle. Les maisons, pour la majorité anciennes, ont la même architecture que dans les Aravis : maisons madriers avec toits en tavaillons. Presque tous les villageois ont un ou deux chevaux et une charrette et c'est leur moyen de locomotion principal dans le village, ils l'utilisent pour tous leurs transports de matériaux courte distance. Beaucoup d'anciens métiers sont d'actualité ici, comme les sculpteurs, mais surtout tout ce qui tourne autour de l'agriculture, à l'ancienne. Vous verrez sur les photos leur manière de faire des meules de foin qui, en plus de donner aux paysages une magnifique unicité, démontre la volonté de conserver les anciens savoir-faire.
(Alors que j'écris, une charrette passe devant la maison. Je prends la photo et la mets en premier sous ce texte.)
Pour finir, je vais vous parler des gens. Je n'ose pas trop les prendre en photo, c'est délicat. C'est dommage car ça me permettrait d'illustrer mes propos. Il y a beaucoup de personnes âgées, comme partout vous me direz. On voit bien qu'ils travaillent tous quelque soit leur âge. Je pense qu'ils s'arrêtent quand ils ne peuvent plus tenir debout. Mais, âgés ou jeunes, ces gens portent sur leur visage la rudesse du travail. Ils ne sont pas habillés en habits traditionnels, il ne faut pas exagérer, Ceausescu est passé par là. Quoi que les Maramures, coincées au nord-est de la Roumanie dans les montagnes, ont été bien préservées de la folie de cet homme grâce à une très active et efficace résistance anti-communiste. Mais leurs habits sont biens vieux et rustiques tout de même, pour les personnes âgées et pour les habits de travail. Donc ces gens portent la marque du travail sur eux mais semblent bien vivre et ne manquer de rien. Et voici ma réflexion, mon hypothèse est qu'il règne ici un bon équilibre. Cela ne veut pas dire que nous sommes au paradis, le pêcher doit bien être présent ici comme partout et ce village doit surement porter son lourd fardeau de bêtise humaine. Voici peut-être un début de preuve de cet équilibre. Ces gens ont un air sérieux, sourcils froncés, mais dès que vous leur adressez un signe ou un bonjour, leur visage se détend et la réponse est franche et immédiate, comme un signe de bienvenue. (Que ça fait du bien ! Ça paraît étonnant mais nous ne nous sommes jamais vraiment sentis à l'aise dans les autres pays (sauf en Finlande). A tel point que nous avons arrêté de dire bonjour aux gens. Nous en reparlerons plus tard).
Je me dis que pour avoir l'air de travailler autant (un peu comme dans nos campagnes il y a quelques décennies) et être aussi accueillants, il doit bien y avoir une forme de bien-être profond qui plane quelque part. Ou peut-être font-ils encore la veillée plutôt que de regarder la télé ?

Voici notre maison :











Et voilà les fameuses meules de foin :





Balaise hein ! Mais comment qui font ? En allant courir j'ai croisé 2 paysans en plein travail dans un champ. Mais ce n'était que le début, je n'ai pas vu le plus intéressant, la construction de la meule. Ils étaient en train de rassembler l'herbe en tas de 1 mètre environ, tout au râteau évidement, et au râteau en bois fait maison, ça va de soi.
Des charrettes, nous en avons croisé des dizaines en 1 journée. Mais c'est délicat de les photographier.




voilà quelques photos des rues du village :









Au grès de notre promenade, nous nous sommes rendus compte que la plupart des villageois avaient aussi une ou deux vaches, un ou deux cochons, et bien sûr des poules et des coqs par dizaines en liberté un peu partout. Je ne parle pas des chiens, dont une partie n'appartient à personne (c'est d'ailleurs un problème en Roumanie car la rage sévit) et qui nous offrent tous les soirs un joli concert !
Notre logement est géré par un couple qui rénove plusieurs anciennes maisons. Ils se sont associés à un autre couple d'amis qui eux gèrent un restaurant juste à côté. Pratique ! Nous avons mangé une fois par jour dans ce restaurant où nous étions seuls ou presque à chaque fois. Andréa, la jeune femme (qui a 4 enfants) qui tient le restaurant, a pris le temps de nous accueillir. Elle a discuté longuement avec nous avant de nous inviter à nous assoir puis, au court du repas, nous avons continué à discuter avec elle. Son mari rénove la maison à côté du restaurant, vous la verrez sur les photos.
Nous avons dégusté quelques spécialités locales sur fond de musique traditionnelle. La polenta est leur accompagnement de base. Nous avons mangé des saucisses avec du choux, de la polenta avec du fromage et des lardons, de la polenta avec du poulet, de la polenta avec des saucisses, de la truite panée aux grains de polenta avec de la polenta, 3 fromages locaux différents avec de la confiture de piment, de la soupe aux haricots...Notre premier repas nous a couté, avec les boissons et le dessert, 36 € et le deuxième 30 €, le troisième ce sera pour demain.

Le premier repas (le soir).
Lendemain midi :



La maison d'Andréa ne vient pas de ce village mais de son village d'origine. Son mari l'a démontée, a numéroté les pièces, et l'a remontée ici :


La scupture est très importante ici. Tout ce qui est en bois est très travaillé, la plupart des maisons ont un portail en bois sculpté. Certaines façades sont sculptées. Nous sommes allés chez un sculpteur qui fait des petites pièces (personnages réels du village, icônes, fuseaux...) et des grosses pièces comme ces fameux portails. Il travail essentiellement le chêne.






Ça, c'est notre portail.

J'ai photographié une machine infernale dans un jardin mais je ne sais pas trop ce que c'est. Avez-vous des hypothèses sur son utilité ?
Nous sommes partis à la recherche de l'église car nous savons qu'elles sont très particulières dans cette région. En fait elles sont en bois, comme les maisons : madriers et toit en tavaillons. Nous avions donc une idée de son apparence extérieure. Par contre nous ne nous attendions pas à cet intérieur. Pourtant nous avions quelques indices...





"Mon dieu que c'est mignon ! Mais regardez-moi la finesse du point !"


Bon j'ai pris en photo presque toutes les façades. je n'ai pas pris la dernière, j'avais trop mal aux yeux...
J'ai parlé un peu trop vite au début en ce qui concerne les habits des gens. Il se trouve que le dimanche pour la messe, ils revêtent les habits traditionnels tissés à la main.
Ainsi s'achève le récit de notre première journée en Roumanie. C'est vrai, ça fait beaucoup de photos mais c'était difficile de faire autrement. Demain, nous avons rendez-vous avec Roxana, notre hôte, le matin pour l'accompagner à l'école et discuter avec les maitresses. Il parait que les enfants sont habillés en peaux d'ours et qu'ils écrivent avec des morceaux de charbon de bois, ça va être génial !
Le lendemain matin...
Nous ne dormons pas très bien la nuit dans ce logement à cause de la literie qui est atroce. Donc nous avons du mal à émerger. Nous étions en retard pour notre premier jour d'école !




Vous pouvez voir le gros poêle au fond de la classe avec le tas de bois.
Nous sommes partis pour une journée de visite des Maramures. Il pleuvait. C'est dommage, les paysages étaient magnifiques mais les photos ne rendent pas très bien à cause du temps. Malgré tout, le tri est difficile et je vous mets "la masse" de photos ! Nous avons quitté notre village. Sur la route, nous avons pris en photo ce marché dans une petite ville :


Dans les Maramures, la visite des église est inévitable et on ne s'en lasse pas tant elles changent de ce qu'on voit partout ailleurs. En voici une sympa, toujours intégralement en bois, avec des dessins bibliques à même les murs et plafonds :




De temps en temps, je vous mettrai des photos de charrettes. Nous en croisons tout le temps, parfois dans des lieux incongrus.



Nous avons visité le monastère de Barsana. Incroyable ensemble de structures intégralement en bois.








A midi, nous avons trouvé un petit resto italien qui ne paye pas de mine mais où ils ne travaillent que des produits frais et où tout était particulièrement bon. Un régal.

Nous le savons, pour connaître un pays, il est important de connaître son histoire. Je dois dire que j'avais sous estimé l'importance et la richesse de cet aspect, surtout dans les pays que nous traversons. Nous avons visité le mémorial des victimes du communisme à Sighetiu Marmatiei. Il se trouve dans l'ancienne prison de cette ville qui s'appelle Sighet. C'était passionnant. C'est un musée qui utilise les quelques 80 cellules de la prison pour expliquer toute cette période (45 années), à l’échelle mondiale. C'était donc très dense. Nous y avons passé 2 heures, bien insuffisant pour Marie, Héloïse et moi, mais juste bien pour les autres. Héloïse a été conquise. Nous avions des fascicules en français qui nous accompagnaient avec un demi page par cellule. Nous avons demandé aux responsables si nous pouvions en garder un pour Héloïse, ils ont d'abord dit non puis, quand nous sommes partis, ils nous ont couru après pour nous le donner ! super sympa.


Dans cette prison, tous types de personnes y étaient enfermés. En gros tous ceux qui vivaient contre le système communiste. Ils y étaient torturés physiquement et psychiquement (pour leur faire avouer leurs crimes, souvent infondés, contre l'état, ou pour leur soutirer des informations). Les récalcitrants étaient enfermés dans un cellule noire, attachés par les pieds, tout nus, sans manger, avec 10 cm d'eau au fond.






On a quand même des vies sympa !

Allez, changeons nous les idées. Une petite charrette dans un endroit incongru : là, on est au centre de la plus grande ville des Maramures.

Et ça papote tranquillou, garé en double file...
Et pour finir, une petite église à Sapanta, mais surtout son "cimetière joyeux". Chaque stèle raconte une anecdote sur le défunt.





Le lendemain matin, il faisait 8 °C et le temps était bien nuageux. Nous avons décidé de braver les éléments pour gravir le sommet le plus proche. Nous sommes allés au départ de la rando en voiture. En sortant du village, nous avons eu la chance de voir le travail des agriculteurs locaux. Nous avons pu faire une petite photo :

L'ours :
En Roumanie se trouve la plus importante population d'ours d'Europe, c'en est même devenu un problème. Ils sont trop nombreux, agressifs envers les troupeaux et les hommes.
Pendant notre trajet en voiture, Marie nous a lu, pour nous mettre dans l'ambiance, la conduite à tenir devant un ours. Voilà.
Nous sommes arrivés au col, nous avons garé la voiture. Il faisait 4,5 °C, nous étions dans les nuages, une pluie fine tombait. Nous avons trouvé le chemin et nous avons commencé à marcher.
Évidemment, en pleine semaine en octobre par 4,5 °C et par temps de pluie, vous imaginez bien que nous étions les seuls couillons à nous aventurer dans la montagne.
Au bout de 15 minutes, après avoir cru entendre 143 fois une branche craquer sous les pas d'un ours, le chemin était barré par des tas de branches sur plusieurs dizaines de mètres (j'imagine des travaux forestiers pour rendre le chemin accessible). L'obstacle était franchissable, sincèrement. Mais, je ne sais pas pourquoi, nous avons décidé de faire demi-tour.

Machin en bois au col où on s'est garés.

Nous nous sommes rabattus sur une petite ballade d'une demi heure pour atteindre un plan d'eau bénite, oui oui, un plan d'eau naturelle mais bénite. Ils sont forts ces chrétiens !

Il n'y a pas que chez nous qu'on trouve de bons hamburgers maison ! ils étaient vraiment excellents ! Frites fraiches s'il vous plait !


Ensuite, nous sommes montés en haut d'une tour de Baia Mare, l'autre grande ville des Maramures :




Allez, une dernière pour la route :


Dernière soirée dans les Maramures. Nous avons conviés nos hôtes pour un petit apéro. Seule Roxana a pu se libérer, son mari étant occupé à bricoler dans leurs différents logements.

